Éditorial

         Le deuxième numéro de la revue Fabriques Urbaines tente le coup pour perpétuer les intentions éditoriales affichées lors du numéro liminaire. Il ainsi réunit cinq articles traitant des thématiques différentes, livrés en Arabe et en Français, les uns émanant des chercheurs de l’université algérienne, un autre en provenance d’une université étrangère. C’est surtout la place accordée à l’ « empire » qui distingue cette livraison, avec en particulier trois contributions issues directement d’un travail de thèse de doctorat et de magister.

C’est le cas du texte de Amina BOUDJADA et Meriem CHABOU-OTHMANI, lesquelles en s’appuyant sur une enquête bien fouillée, réalisée à l’occasion de la préparation d’une thèse de Magister, mettent en exergue le concept de l’ « Evènementiel ». Elles essayent alors de montrer que ce terme, bien qu’il soit d’usage récent dans les affaires urbaines algériennes, tend à s’imposer comme un levier incontournable, usité par les pouvoirs publics pour améliorer l’attractivité touristique des territoires dont ils sont les gestionnaires. Les auteurs ont bel et bien saisi l’opportunité de la désignation de la ville de Constantine, Capitale de la culture arabe, durant l’année 2015, pour aller jusqu’au bout de leur démonstration !

La réflexion de Alla-Eddine FENCHOUCH est aussi basée sur la récolte d’un important matériau empirique. Le texte de l’auteur, un peu court, fruit d’un long parcours doctoral, s’annonce comme un résumé ou un détour de son travail de thèse plutôt qu’un article axé sur une problématique bien concise. À partir de l’exemple de la ville de Skikda, l’auteur nous rappelle, à travers le prisme de la centralité urbaine, à quel point la fabrique de la ville loin de ses noyaux citadins anciens, se fait à l’aune d’une participation, de plus en plus intense et diverse, des acteurs privés, commerçants et habitants ordinaires !

Accorder de l’importance au travail empirique n’exclut pas d’adopter dans une seule recherche, des approches mixtes, combinant démarche quantitative et démarche qualitative ; c’est du moins ce qu’on peut lire en filigrane du texte d’Aïda DJEGHAR, qui sur la base de ses enquêtes menées dans le cadre d’une recherche doctorale portant sur la mobilité résidentielle à Constantine, livre un éclairage théorique sur deux vocables, différents dans leur étymologie mais très proches dans le sens qu’ils évoquent : « La migration » et « la mobilité résidentielle » !

Le thème de la mobilité est également au cœur du propos fourni par Ali HADJELA. L’auteur focalise son attention sur le rapport qui peut s’établir entre le transport et le développement urbain durable de la ville de Tébessa. En prônant une approche fondée essentiellement sur l’usage des programmes d’information géographique pour quantifier le phénomène étudié, HADJELA constate que le déplacement des êtres et des choses, sans cesse croissant, conjugué à un réseau urbain déficitaire, complexifie le quotidien des habitants, consomme beaucoup d’énergie et impacte l’environnement !

Enfin, Koffi Benoit SOUSOU et al, projettent le lecteur ailleurs, très loin du contexte algérien, en le plongeant dans les conditions épouvantables dans lesquelles vivent de nombreuses femmes de Libreville, au Gabon. Les auteurs s’intéressent spécialement aux femmes qui travaillent comme récupératrices d’objets-déchets dans la décharge de Mindoubé. Si la démonstration est très illustrative de la précarité de ces femmes, il n’en reste pas moins qu’elle est édifiante de deux idées majeures ; d’une part, la possible transformation d’un a priori non-lieu en un territoire-ressource, et que, d’autre part, la capacité entrepreneuriale n’est pas l’apanage des plus aisés, qu’elle émane aussi et surtout des marginaux, des exclus dont la lutte pour le droit à la ville brouille souvent les clivages dominants-dominés qui traversent le corps social !

                                                                                                                    Lakehal Ahcène. Rédacteur en chef

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